Skip to content

L’histoire “neutre” n’existe pas, exemple concret.

Les réflexions que nous vous livrons dans des articles comme « L’histoire “neutre” n’existe pas » évoluent au fil de notre expérience. Notre pratique alimente ces réflexions et ces réflexions alimentent nos pratiques. Cette question du positionnement politique était déjà présente depuis longtemps avant que nous en dessinions les contours et formulions notre avis. Aujourd’hui la question n’est plus vague mais très concrète et à chaque nouvelle écriture, nous nous la posons.

Pour illustrer tout cela, voici quelques exemples de réflexions que l’écriture de notre dernière visite « Chronique des lyonnaises inconnues » a suscitée (et qui explique en partie pourquoi nous avons mis tant de temps à l’écrire).

Le point de départ, une formation.

Le sujet « des femmes lyonnaises » nous a plongées dans des affres de réflexions sur notre positionnement politique. D’un côté on voyait des chaînes Youtube de vulgarisation historiques mettant l’accent sur des femmes et qui recevaient des commentaires leur reprochant une approche « trop féministe ». Le simple fait de parler de femmes peut-il être qualifié de féministe ? D’un autre côté, on suivait des visites que nous aurions volontiers rebaptisées « les femmes vues par le patriarcat du 19e siècle »…
Et nous, on se situe où ? 

Cette question qui paraît simple nous a demandé du temps en réalité. Il a fallu nous renseigner et réfléchir aux différents sujets relatifs à la place des femmes dans l’histoire afin que chacune de nous se positionne, puis que nous trouvions un positionnement qui convienne à toute l’équipe. Pour nous aider, nous avons fait appel à Claire Morandeau, formatrice sur l’égalité femme-homme. Elle nous a nettement aidées à débroussailler le vaste terrain vague dans lequel nous mettions gaiement les pieds !

Un sujet qui nous tient à cœur, ou l’envie d’être irréprochables.

L’équipe Cybèle est sensible à la question de la place des femmes dans la société et le sujet nous tient à cœur. C’est d’ailleurs pour cette raison que nous avions très envie d’ancrer cette thématique générale dans notre territoire, la ville de Lyon. Et pourtant, dans nos visites nous voulons nous adresser à un public large ! Cela signifie éviter l’élitisme autant que possible mais aussi ne pas parler exclusivement aux personnes qui pensent comme nous : ne pas faire d’entre-soi. 

C’est une ligne rouge que nous nous sommes fixée après avoir suivi une visite guidée sur ce même sujet. Elle s’adressait clairement à des militantes convaincues, et c’est bien que des propositions de ce type existent. Mais nous nous sommes demandé ce qu’en auraient pensé nos amies qui ne sont pas acquises à la cause. Elles n’y auraient sans doute pas trouvé leur compte et n’en seraient probablement pas sorties avec une compréhension des rouages d’une société patriarcale, contrairement à ce que cette visite voulait (probablement) faire. Notre souhait était de nous adresser à un public plus large.

Cette visite que nous avons suivie nous a également alertées sur le danger de ne pas remettre les femmes dont on parle dans leur contexte historique. Cela peut nous amener (la guide et le public) à juger les femmes et hommes du passé à travers nos lunettes du début du 21e siècle. Impossible alors de comprendre les rouages des sociétés passées, ni d’avoir un regard éclairé sur notre positionnement actuel, ni d’où il découle. Recontextualiser, c’est permettre à nos visiteureuses de se dire « hier c’était comme ci, à l’époque ils pensaient comme ça, et aujourd’hui nous voyons les choses autrement ». C’est permettre de prendre conscience que les pensées évoluent et qu’on peut faire bouger des lignes. Ça amène à se demander où est-ce qu’on veut amener la société de demain et donc à se poser la question de comment y arriver.

Les recherches et comment parler de l’invisible.

En parallèle, nous commencions les recherches. Parler de la place des femmes dans l’histoire, c’est parler de l’invisible. Cela passe par des recherches moins évidentes que sur d’autres sujets. 

Depuis notre prise de conscience de la non-objectivité de l’histoire, nous vérifions encore davantage nos sources. Viennent-elle d’un·e historien·ne ? Quel est le parcours de cet·te historien·ne ? Pour ce sujet nous avons fait des recherches générales sur la place des femmes dans l’histoire française/occidentale et des recherches plus ciblées sur Lyon à travers la recherche de figures féminines liées à la ville. Ces femmes sont peu visibles, il a donc fallu creuser.

Et puis cette invisibilité est un sujet en soi. Parler des invisibles quels qu’ils soient, c’est parler d’une autre histoire que celle que l’on entend habituellement. Nous n’avions pas envie de parler des quelques rares grandes figures féminines qui ressortent toujours. Nous voulions au contraire montrer la diversité des figures féminines, qu’elles soient validées par la société, ou non. Qu’elles soient puissantes ou non. Qu’elles aient agi seules ou à plusieurs.

Le déblocage. Pensons concret !

Voilà tout ce que nous avions en tête et qui nous a demandé du temps. On a beaucoup réfléchi. Trop peut-être ! A force de définir ce que nous voulions et ce que nous ne voulions pas pour cette visite, on n’avançait pas dans l’écriture. Bien que très intéressant, ce cheminement qui aurait pu être infini devait s’arrêter.

Un jour, pour briser ça on a choisi, de manière arbitraire et parfaitement subjective 10 femmes lyonnaises et événements liés aux lyonnaises. Sans bien savoir où ça mènerait. Pour chaque, on s’est demandé pourquoi celle-ci nous semblait intéressante ? Qu’est qu’on avait envie de dire d’elle ? Comment en parler ? Sous quel format ? En passant par quelles émotions ? 

Le concret était arrivé ! Et il était alimenté par ces mois de recherches et de discussions dans la nébuleuse. A partir de là, on peut presque dire que c’était facile. Facile de trouver la cohérence, de sélectionner les thèmes et figures, de rédiger… bref de jouer avec tous ces mois de travail derrière nous !

En savoir plus sur notre visite « Chroniques des Lyonnaises inconnues ».

Musicienne, comédienne et guide-conférencière, Lucille est une lyonnaise d’adoption : née en Normandie, elle voue encore un culte au beurre demi-sel. Aimant le théâtre et la musique, elle fut tour à tour spectatrice, régisseuse et prof.

Cet article comporte 0 commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Back To Top