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[Le propos 3/4] Moins de contenu mais mieux 

Le Propos
1. [Le propos 1/4] De l’importance d’avoir un choix éditorial en visite
2. [Le propos 2/4] Exercices pratiques : définir son propos 
3. [Le propos 3/4] Moins de contenu mais mieux 
4. [Le propos 4/4] Pour aller plus loin : les objectifs émotionnels 

Si vous tombez sur cet article mais que vous n’avez pas lu la définition du propos, on vous conseille de commencer par le premier article de la série. 🙂 

L’intérêt de définir un propos ou une ligne éditoriale en plus de la thématique de sa visite, c’est qu’on peut désormais sélectionner les informations que l’on va délivrer au public de façon très cohérente et réfléchie, pas au petit bonheur la chance ou bien simplement par ce qu’on aime raconter telle ou telle anecdote. 

Quand on a un propos, on peut se permettre d’en dire moins, mais mieux. 

On ne peut pas tout dire. On ne doit pas tout dire.

Un titre qui a tout l’air d’une lapalissade, mais qui n’en est pas une, loin de là. Car c’est notre gros défaut à nous les guides. On veut tout dire. On veut toujours en dire trop. Et si on se laisse aller, on assomme les gens avec des visites fleuves de 4h. Que retiendront les gens de ces 4h ? Peut-être seulement qu’ils ont fait une visite, et que c’était long. Dommage !

Ou pire, on se laisse aller, et au bout d’1h on se rend compte qu’on était censée parler 30 minutes maximum à cet endroit, et qu’on aura pas le temps de tout voir. Frustration maximale pour le public ! 

Dans une visite, on le sait, on ne peut pas tout dire, il faut sans arrêt faire des choix. Des choix que l’on fait au moment de la conception de la visite, parce qu’on sait que tel ou tel sujet est trop long, pas forcément indispensable, ou qu’on n’aura pas le temps, mais parfois aussi au moment de la visite. Lorsqu’un groupe est en retard par exemple, on peut :

  • faire une visite à toute vitesse, parler à 100km/h, marcher trop vite, et ne laisser la place pour aucune question pour tenter de tout dire. (Je l’ai vécu en tant que public, c’était horrible)
  • faire une sélection de dernière minute, enlever du contenu et raccourcir la visite.

Au final, on a tous et toutes les mêmes défauts : au moment d’écrire la visite on a toujours peur de ne pas avoir assez de choses à dire, et quand on y est, c’est toujours trop long ! Et malheureusement, on ne se pose pas assez la question : “qu’est-ce que j’enlève ?”…

Non, enlever du contenu n’est pas un “appauvrissement”

Là encore, c’est une idée reçue contre laquelle nous nous battons constamment, en particulier dans les formations que l’on donne, mais aussi dans des discussions avec nos confrères et consœurs : enlever du contenu n’appauvrit pas forcément votre visite.

Enlever du contenu, c’est créer une respiration pour laisser le public intégrer ce qu’on vient de dire. C’est limiter la quantité d’information pour avoir plus de chances que celles que l’on délivre soient retenues. C’est aussi ne pas ennuyer les gens. 

À Lyon, la nouvelle scénographie du Musée Gadagne fait couler beaucoup d’encre, et pour beaucoup de professionnelles de la médiation ou des musées, c’est un scandale car il n’y a presque plus d’objets exposés. Pourtant, dans l’ancienne scénographie, il y avait tellement de contenu que la plupart des gens n’arrivaient jamais au bout, beaucoup finissaient par se fatiguer, et traverser les dernières salles sans s’arrêter. Désormais, il y en a moins, mais il est plus impactant, mieux mis en valeur. 

Alors non, enlever du contenu n’est pas un appauvrissement. C’est un choix éditorial qui, s’il est bien fait, peut considérablement améliorer la compréhension et l’intérêt général, au lieu de noyer notre cerveau sous des quantités astronomiques d’information.

Anecdotes en visite guidée

Le propos pour faire un choix éditorial

Lorsque le propos de la visite est bien défini, il devient très simple de sélectionner le contenu à supprimer. Il suffit de voir si ce contenu est indispensable pour servir ce propos. S’il ne l’est pas, alors c’est un contenu que l’on peut enlever quand la visite est trop longue.

Cet exercice n’est jamais facile à faire, nous le savons bien. Lorsque l’on a fait des semaines voire des mois de recherches, que l’on a toutes ces informations passionnantes, on est toujours frustrées de ne pas pouvoir les transmettre. Mais quand on se fait violence, qu’on les enlève, qu’on constate qu’on a fini à l’heure et que le public est ravi, on voit bien que ce n’était pas “indispensable”. 

Nous sommes les premières concernées ! Lors d’une de nos créations récente, notre premier test durait presque 2h, alors que nous ne souhaitions pas dépasser 1h30 de visite. Et la mort dans l’âme, nous avons supprimé du contenu. Au final, nous sommes très heureuses du résultat.

Un exemple de sélection de contenu en fonction du propos

Reprenons l’exemple de notre visite sur la seconde guerre mondiale. Notre propos est de montrer que les gens normaux n’étaient souvent ni résistants, ni collabos, et que parfois tout était très gris. Nous voulions absolument qu’un personnage de l’histoire soit entre les deux. Pour cela, nous devions le faire apparaître comme “collabo” au début, puis le faire sauver une famille de juifs à la fin de la visite.

Pour cela, nous avons été contraintes de faire un choix en début de visite. La scène où il s’extasie sur le Maréchal Pétain était trop longue. Il fallait enlever quelque chose à cette scène. Alors nous avons enlevé une explication sur la guerre au niveau Européen qui était certes intéressante, mais pas indispensable et surtout, qui ne servait pas notre propos. Nous avons choisi de privilégier le passage où le personnage passe pour “collabo” même si cela ne donne aucune information historique à proprement parler. 

Dans le prochain article, nous verrons un autre moyen de servir le propos : définir des objectifs émotionnels. 

Guide, musicienne et conteuse, Clémence est un peu lyonnaise et 100% Rhônalpine : elle fut nourrie à la crème de Bresse et à la châtaigne d’Ardèche. Passionnée par le monde médiéval et l’architecture, elle adore raconter des histoires.

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